http://www.senat.fr/questions/base/2018/qSEQ180806433.html
Question écrite n° 06433 de M. Michel Dagbert (sénateur du Pas-de-Calais)
Michel Dagbert attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la présence de substances chimiques dans les vêtements et les chaussures.
En 2014, suite à de nombreux signalements de cas d'allergies et d'irritations, les ministères de l'économie et de la santé avaient conjointement saisi l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). Il s'agissait d'identifier les éléments chimiques irritants ou sensibilisants cutanés, réglementés ou non, susceptibles d'être présents dans ces articles.
Le rapport de l'ANSES publié le 4 juillet 2018 indique que treize substances identifiées ont été retrouvées dans les vêtements et seize dans les chaussures. Des substances potentiellement dangereuses comme le chrome , la paraphénylènediamine (présente dans les colorants), les nonylphénols et nonylphénols éthoxylates (utilisés comme auxiliaires pour le nettoyage et le rinçage, mais aussi pour teindre et blanchir les textiles), ont été décelés. Des métaux lourds tels le cobalt, le cuivre, le plomb, le cadmium, le mercure ou le nickel ont également été retrouvés.
L'ANSES a émis plusieurs recommandations à l'attention des autorités. Elle propose ainsi de maintenir une pression de contrôle, de réviser le seuil réglementaire du chrome VI dans les articles en cuir, de fixer un seuil réglementaire pour le nickel dans les textiles ou de mettre en place une classification européenne pour les substances non réglementées.
Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les suites qu'il entend donner à ces recommandations.
Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée dans le JO Sénat du 11/10/2018 p. 5178
De nombreux cas d'allergie et/ou d'irritations cutanées a priori en lien avec les textiles d'habillement ou les articles chaussants ont été rapportés ces dernières années à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Il n'est pas certain que ces cas soient plus nombreux que par le passé, mais il est clair que les consommateurs les signalent davantage. C'est pourquoi la DGCCRF et la direction générale de la santé (DGS) ont conjointement saisi, le 6 novembre 2014, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) pour la réalisation d'une étude portant sur la « sécurité chimique des articles chaussants et textiles d'habillement ».
Cette expertise, dont les résultats ont été publiés le 4 juillet 2018, a permis notamment d'identifier les substances chimiques les plus préoccupantes à cet égard, pour lesquelles l'ANSES émet, substance par substance, des recommandations. Par ailleurs, ce rapport préconise certaines recommandations, de portée plus générale, qui peuvent utilement s'appliquer auprès des différents partenaires publics et privés.
Un projet de restriction de la Commission européenne portant sur les substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (CMR) dans les textiles, vêtements et chaussures a été adopté en avril 2018 par les États membres. Il permet de limiter l'exposition à plusieurs substances CMR (dont le Chrome VI), en restreignant leur mise sur le marché dans ces catégories d'articles. Par ailleurs, une proposition de restriction sur les sensibilisants et irritants cutanés dans les textiles a conjointement été émise par la France et la Suède. Le dossier de restriction est actuellement en cours de préparation par les agences française (ANSES) et suédoise (Kemi) toutes deux compétentes en matière d'évaluation et sera soumis à l'agence européenne des produits chimiques (ECHA [1] ) en janvier 2019.
Forte des recommandations de l'ANSES, la France soutiendra activement auprès des instances européennes (Commission et ECHA) l'adoption de classifications dans le cadre du règlement CLP, pour les substances non réglementées et identifiées comme responsables d'allergies cutanées en tant que « sensibilisant et/ou irritant cutané ». Par ailleurs, la DGCCRF continuera d'exercer une pression de contrôle sur les articles textiles et chaussants en matière de sécurité chimique, comme elle l'a fait ces dernières années. A ce titre, une enquête nationale concernant la sécurité de certains types de vêtements est actuellement en cours et deux enquêtes nationales portant sur les articles chaussants ont été réalisées en 2017 (avec recherche, dans les échantillons prélevés, de chrome VI, de colorants azoïques, de Dmfu [2], de nickel dans les rivets notamment).
Les directions départementales chargées de la protection des populations (DD (CS) PP) réalisent ainsi des contrôles, soit planifiés, soit sur initiative, soit suite à des plaintes de consommateurs, tout au long de l'année sur les articles textiles et chaussants. Enfin, la DGCCRF relaiera aux consommateurs le message de l'ANSES relatif à l'importance de laver, avant sa première utilisation et dans la mesure où le produit s'y prête, tout article textile d'habillement destiné à entrer en contact avec la peau, afin de minimiser les risques d'allergies cutanées. À noter que ce type de message pourra également être relayé via le site internet (prévu pour la fin de l'année 2018) et la campagne de communication (en 2019) dont la réalisation et le pilotage ont récemment été confiés à l'agence Santé publique France par les ministères de l'économie, de l'écologie, de la santé, de l'agriculture et du travail. [1] European CHemicals Agency :
L'agence européenne des produits chimiques réglemente les produits chimiques et les biocides sur le marché de l'UE. Elle examine les données sur les produits chimiques transmises par l'industrie et se prononce sur leur conformité à la législation. En partenariat avec les pays de l'UE, elle se concentre sur les substances les plus dangereuses pour mener au besoin une politique de gestion du risque au bénéfice de la population et de l'environnement. [2] Le diméthylfumarate est une substance fortement allergisante qui a été à l'origine de plusieurs cas de graves réactions cutanées en 2008-2009, du fait de son utilisation comme fongicide pour protéger des canapés et des articles chaussants contre les moisissures. Sa présence est désormais interdite.